Rencontre avec Docteur Pierre-Antoine Pradervand, spécialiste en médecine de la reproduction, endocrinologie gynécologique et en gynécologie obstétrique opératoire au sein de Hirslanden Clinique Cecil. Il nous révèle les différentes causes, symptômes et traitements liés à l’insuffisance ovarienne prématurée. Une maladie peu connue qui touche entre 0.1 et 1% de femmes avant l’âge de 40 ans.
Pouvez-vous nous exposer les causes et les symptômes liés à cette insuffisance ovarienne prématurée ?
En général, les patientes observent principalement un dérèglement de leur cycle menstruel voire une absence prolongée de plusieurs mois, que l’on appelle une aménorrhée.Elles viennent nous consulter soit pour des problèmes de fertilité, soit lors d’irrégularités ou de disparitions des cycles. Cette disparition des cycles se produit car l’ovaire est prématurément fatigué. Cela se traduit au niveau sanguin par des valeurs hormonales de FSH extrêmement élevées. La FSH est cette hormone secrétée par le cerveau, qui va régulariser et organiser le cycle ovarien. Mais si l’ovaire est fatigué, comme c’est le cas dans l’insuffisance ovarienne prématurée, les valeurs de FSH augmentent dans le sang des patientes en raison de l’absence de réponse des ovaires à la stimulation.
Quels sont les traitements conseillés pour les femmes qui sont en âge de grossesse ?
Malheureusement, le traitement de l’insuffisance ovarienne prématurée, en termes de fertilité, est proche de 0. Ce qu’il faut savoir est que plus le diagnostic d’insuffisance ovarienne prématurée intervient tôt, meilleur sera le pronostic reproducteur de ces femmes, qui auront des chances, certes maigres, de tomber enceinte spontanément. Étant donné que leurs ovaires sont essoufflés, leur FSH est constamment très élevée. Soumis à cette stimulation constante, l’ovaire peut trouver un petit sursaut de vigueur et ovuler spontanément. Mais ce sont des chances considérées de 5 à 10% maximum par année, ce qui est évidemment très faible pour une femme jeune en période reproductrice…
Existe-il alors un traitement hormonal ?
On va leur proposer un traitement hormonal d’œstrogènes et de progestérones dit de « remplacement » afin de pallier la déficience de l’ovaire. Cela semble améliorer les chances de grossesse, mais est surtout très important pour leur santé, du fait des risques liés à une carence essentiellement œstrogénique. Ces hormones sont administrées selon un schéma séquentiel, ce qui crée un cycle artificiel. Les os, les vaisseaux, le système nerveux central entre autres bénéficient de ce traitement de remplacement.
Malheureusement en termes de traitement de fertilité, nous sommes mal armés. On peut leur proposer un don d’ovocyte, c’est-à-dire recourir à une patiente qui leur mettrait à disposition ses ovules, dans l’optique d’un traitement de fécondation in vitro. L’embryon, créé avec l’ovule de la donneuse et les spermatozoïdes du conjoint, est ensuite transféré chez la patiente.
Enfin, il y a évidemment une prise en charge psychologique chez ces jeunes femmes qui traversent des bouleversements majeurs. Ces ovaires qui s’éteignent et qui emportent avec eux les projets de grossesse, sont souvent ressentis comme le symbole d’un vieillissement global prématuré.
Quelles sont les causes de l’insuffisance ovarienne prématurée ?
Les traitements de chimiothérapie ou de radiothérapie consécutifs à un cancer font partie des causes courantes.
Pour le reste, nous n’avons la plupart du temps aucun diagnostic. Les femmes naissent avec un stock d’ovules, qui sera mis à disposition à la puberté. Dès le début des cycles menstruels, les femmes puisent dans leurs stocks au quotidien afin de permettre une ovulation une fois par mois. Chez certaines femmes, la gestion des réserves est déficiente : au lieu d’utiliser leur stock de manière parcimonieuse sur trente-quarante ans de vie reproductive, elles vont le dépenser en dix, quinze ou vingt ans seulement.
Il y a également des causes génétiques, chromosomiques ou géniques. Le Syndrome de Turner, à savoir l’absence d’un chromosome X, est l’anomalie chromosomique la plus fréquemment retrouvée.
On trouve aussi différents spectres de maladies auto-immunes qui peuvent conduire à une autodestruction de l’ovaire.
Finalement, les chirurgies trop agressives sur l’ovaire, ou des causes infectieuses comme la tuberculose ou les oreillons peuvent aussi détruire l’ovaire.
La Clinique Cecil assure-t-elle une prise en charge complète pour cette typologie de patientes ?
Oui, dans un premier temps, on les reçoit pour faire un diagnostic, tenter de mettre en évidence une des causes éventuelles, mais dans 80% des cas le bilan sera totalement négatif. On s’assure ensuite qu’il n’y ait pas de complications associées pour la santé de la patiente mais également celle de ses enfants présents ou à venir. Et finalement on définit une stratégie de prise en charge orientée sur les besoins de la patiente au moment du diagnostic. Cette prise en charge peut être multidisciplinaire selon les systèmes touchés.
Hirslanden Clinique Cecil
Av. Louis-Ruchonnet 53, 1003 Lausanne
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